Le 16 décembre 2019, les Verts du Val-de-Travers ont défendu la résolution ci-dessous et vous invite à signer la pétition citoyenne y relative.

Texte de la résolution

Le Conseil général de la Commune de Val-de-Travers demande au Secrétariat d’Etat aux Migrations, au Service des Migrations du Canton de Neuchâtel et au Tribunal Administratif Fédéral, le réexamen pour renouveler le permis de séjour en faveur de la famille Ayvazov – Korolova. En outre il est demandé qu’un effet suspensif sur la décision actuelle de renvoi puisse être appliqué à la procédure en cours.
L’urgence est demandée.
La famille Ayvazov-Korolova réside à Noiraigue depuis 2008 ; elle se compose de Monsieur Yaroslav Ayvazov et Madame Vira Korolova, ressortissants ukrainiens russophones, et des enfants Varvara, Alexandra et Andrei, tous trois nés dans le Canton de Neuchâtel (respectivement en septembre 2008, en juin 2010 et en décembre 2017).
Cette famille s’est impliquée avec enthousiasme et sans compter dans la vie culturelle de la région depuis plus de 10 ans, et nous estimons qu’elle est intégrée.
En décembre 2016, le Service des migrations du Canton de Neuchâtel s’est déclaré favorable à l’octroi d’une autorisation de séjour en faveur de la famille. Leur dossier a alors été transmis au Secrétariat d’Etat aux migrations, lequel a refusé l’octroi d’une autorisation.
Nous sommes inquiets à l’idée qu’ils puissent se retrouver expulsés dans un pays en guerre civile (région du Dombass) , dont les enfants ne parlent pas la langue (qui n’est pas celle de leurs parents puisqu’ils appartiennent à la minorité russe d’Ukraine), et où sévit une discrimination linguistique poussée.
Ce serait exposer les parents et ces enfants nés dans le Canton à une situation d’une extrême gravité. En particulier, nous considérons que la décision de renvoi va à l’encontre du respect de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant.

Intervention au Conseil général

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,
C’est en tant que simple citoyen à Val-de-Travers, sans étiquette partisane et attaché à nos valeurs démocratiques, que ce soir je m’adresse à vous au sein de ce Conseil. Une résolution, c’est une partition à laquelle on n’est pas forcément habitué, elle pourrait même paraître à certains quelque peu .. inorthodoxe, d’autant plus que la clause d’urgence est demandée.
Avant d’entrer dans ce débat, Monsieur le Président, permettez-moi de rappeler des propos qui ont été tenus au sein de ce Conseil il n’y a pas si longtemps ; c’était le 30 septembre dernier – vous les retrouvez dans le procès-verbal qu’on vient d’approuver – lorsque … le Président lui-même, M. Roland Schorderet, déclarait ceci :
« … arrivés aux trois quarts de la présente législature … tous ensemble nous avons œuvré pour le bien commun et ceci malgré nos différences d’orientation politique qui n’ont que peu d’importance par rapport à l’intérêt général de notre commune et de sa population.
Car ne l’oublions pas, nous représentons l’ensemble des Vallonniers. À ce titre, je salue tout d’abord la belle tenue des débats qui se sont déroulés jusqu’à ce jour, empreints de respect mutuel. Notre rôle est de rapporter les difficultés de nos concitoyens de toutes catégories sociales.., ceci dans un esprit humaniste au sein de notre démocratie dont nous sommes un humble maillon par notre engagement. .. ».
Si je me suis permis de rappeler ces propos, emplis de sagesse et de responsabilité, c’est parce qu’il me semble qu’ils collent parfaitement pour justifier le dépôt d’une résolution en faveur de citoyen-n-e-s établi-e-s depuis plus de 10 ans au Vallon et qui doivent justement faire face à une situation difficile.
La pétition est un des instruments dont on dispose pour nourrir une démocratie vivante. Comme vous le savez donc, une pétition circule dans la commune en faveur de la famille Ayvazov-Korolova. La mobilisation citoyenne est des plus remarquables, puisque pour le moment, elle a déjà récolté au moins 700 signatures directement sur papier, et plus de 4’000 via Internet. Et c’est en ce moment que tout se joue, puisque la pétition court jusqu’à demain. D’ailleurs certains d’entre nous ont déjà été sensibilisé-e-s, et ils ont signé cette pétition.
En tant que membre de ce Conseil et avec mes cosignataires, on pense non seulement que ce serait une erreur politique que d’ignorer cette mobilisation ou de rester dans l’indifférence, mais surtout qu’il nous est possible de faire un geste symbolique complémentaire, par le biais d’une résolution. Le but étant de donner un écho supplémentaire à la mobilisation citoyenne, en quelque sorte de servir de caisse de résonance.
D’ailleurs les termes de la résolution sont directement inspirés par ceux de la pétition citoyenne :
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, permettez-moi encore quelques mots, dès lors que la clause d’urgence doit être approuvée par 2 tiers de l’assemblée. Il convient de rappeler qu’au moment de voter sur l’urgence, une abstention équivaudra quasiment à un refus de discuter de la résolution ce soir. Aussi j’espère que vous conviendrez que l’urgence est bel et bien nécessaire, et vous prie de bien vouloir l’accepter.
La famille Ayzazov-Korolova vit avec une véritable épée de Damoclès suspendue au dessus de leur tête ; les parents et leurs 3 enfants peuvent être renvoyé-e-s du jour au lendemain, cela ne tient qu’a un fil. Et notre Conseil a la possibilité ce soir, soit de consolider ce fil, soit de l’affaiblir.
Certes, notre Conseil général n’a aucune prise ni compétence sur une procédure judiciaire en cours, et dans notre État de droit démocratique, la séparation des pouvoirs est précieuse. Cette résolution n’a donc aucunement le but d’interférer avec les autorités administratives et judiciaires, mais il existe toutefois une véritable dimension sociale et politique que nous aurions tort de ne pas prendre en considération.
Des personnes très intentionnées se mobilisent autour d’un collectif citoyen, pour aller bien au-delà de la récolte de signatures. Des informations importantes seront communiquées cette semaine, via la presse ; d’ailleurs un article sur Arcinfo est en cours de rédaction. Pour l’heure elles sont encore confidentielles – je ne peux pas trop vous en dire – mais sachez qu’il subsiste un espoir que leur situation se régularise au plan administratif et financier, et ce très prochainement. Pour notre part, déjà ce soir, nous avons la possibilité de renforcer cet espoir.
Au plan social, quasiment émotionnel, chacun est libre d’écouter son cœur, son âme ou sa conscience. Toutefois à la veille de Noël, alors que la plupart d’entre nous sommes dans les préparatifs des fêtes de fin d’année, peut-on détourner notre regard et rester indifférent, les mains dans les poches, sans broncher, et de la sorte nous accommoder qu’une famille établie au Vallon depuis 10 ans puisse être renvoyée vers un pays qui connaît la guerre civile ? Ce serait moche.
Au plan politique, peut-on honnêtement ignorer la mobilisation citoyenne qui a pris avec vigueur ? Les citoyen-n-e-s se plaignent facilement et régulièrement que les élu-e-s politiques ne sont plus capables de porter leurs aspirations, et ils se détournent de plus en plus de la chose publique. On a l’opportunité ce soir de démontrer qu’au contraire nous sommes en phase avec leurs préoccupations, et si cette résolution urgente peut contribuer quelque peu à enrayer le manque d’intérêt de la population vis-à-vis de la politique, alors elle paraîtra pertinente.
Enfin nous avons débattu tout à l’heure du budget 2020, mais où nous devons garder à l’esprit deux éléments importants : l’attractivité démographique de la Commune, et la solidarité intercommunale. Notre Commune souffre d’une image qui n’est pas attractive, à l’instar de celle du Centre sportif régional. Dans un futur, que l’on espère pas trop éloigné, l’équilibre budgétaire passera par un accroissement de la population résidente ; mais tout en songeant à attirer de nouveaux/elles habitant-e-s, faisons aussi un geste pour essayer de garder les personnes qui sont déjà là ! Et sans que cela ne nous coûte quoi que ce soit, hormis le temps consacré ce soir.
En outre, notre Commune bénéfice depuis sa naissance de la solidarité intercommunale, via la péréquation à hauteur de quelques 4 millions chaque année ; sans cette solidarité, notre situation serait intenable. Aussi sachons faire preuve de solidarité envers nos concitoyen-n-e-s comme les autres communes riches font preuve de solidarité envers nous.
Pour l’image de notre Commune, à l’interne et à l’externe, accepter cette résolution avec la clause d’urgence est donc non seulement une question de cœur, mais aussi de raison.
Il subsiste une lueur d’espoir, et nous avons le choix entre la faire durer et même grandir, ou au contraire basculer du côté obscure ..
N’hésitons pas à accomplir un geste simple, mais qui assurément illuminera le cœur des citoyennes et citoyens vallonniers/ères et au-delà.
Pour signer la pétition citoyenne, cliquez ici